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Engagement du chrétien dans le monde : pas de bonnes raisons pour hésiter !

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Type : Réflexion
Thème : Vie Chrétienne
Source : Construire Ensemble
Réf./Date source : 56  
Publié sur Lueur le

Au début de cette année, Nicolas Sarkozy écrivait à un pasteur qui l'avait invité à une manifestation de sa fédération. Quelques lignes de cette lettre méritent d'être méditées :
« ...Je tiens à vous faire savoir que je reconnais un rôle déterminant aux Églises appartenant à votre fédération, comme aux Églises en général, pour leur influence positive dans la paix sociale. Le fait social est postérieur au fait religieux dans l'ensemble des civilisations. Ce dernier est en train de reprendre la place que la modernité lui avait contestée. Le fait religieux est l'un des ciments essentiels de la fraternité... En tant que ministre... et en tant que citoyen, je vous exprime ma confiance et mon espérance pour poursuivre votre mission… »
Les politiques sont des diplomates et nous pourrions penser que ces lignes du Ministre de l'Intérieur ne sont que de la rhétorique, mais ce serait une grave erreur. Il y a là, comme chez beaucoup de nos élus, une attente qui n'ose pas dire son nom et une espérance que nous ne pouvons décevoir.

Service obligatoire

Quoi que nous pensions des clivages partisans et de quelque côté que penche notre coeur citoyen, les chrétiens que nous sommes doivent impérativement et sans réserve, se mettre au service de la nation (en tant que rassemblement du peuple), avec le seul motif de manifester concrètement et dans toutes les sphères de la société, l'amour du prochain. Cet amour du prochain n'est pas une option, moins encore une technique d'approche dans l'évangélisation : il est un ordre du Dieu qui a tant aimé le monde qu'il n'a pas sélectionné ceux pour qui il donnait son fils.

Notre responsabilité et notre rôle ne sont pas de déclarer, du haut de notre salut (pour lequel nous n'avons aucun mérite sinon d'avoir reconnu notre incompétence et notre faiblesse) que le monde est mauvais et qu'il faut s'en dégager. La Bonne Nouvelle est celle qui sauve, non celle qui condamne.

Pas d'autre champ d'action

Nos hésitations à être engagé dans la société civile qui nous accueille est un manquement grave à notre vocation. Lorsque Mardochée se demande si Esther n'a pas été placée là où elle est pour y remplir une mission de salut, il répond implicitement à son questionnement. Et si nous sommes contemporains d'une société française (ou autre), au creux d'une histoire chaotique qui cherche son sens au-delà d'une définition boiteuse de la post-modernité, c'est parce que c'est là, et nulle part ailleurs, que nous devons être levain dans la pâte. Il n'y a pas d'autre environnement humain que celui dans lequel nous sommes : c'est ici et maintenant que nous devons agir au nom de Jésus-Christ.

Et même si nous nous lamentons de n'être que quelques-uns, forts démunis, le Seigneur nous a déjà prévenus : un peu de levain fait lever toute la pâte !

Et les risques ?

Alors, concrètement, comment agir ? Comme faire surtout sans courir trop de risques ? Celui de la compromission ; celui de la récupération ; celui de la dispersion ; celui de l'incompréhension ; celui de la condamnation et pourquoi pas celui de la persécution…

Premièrement accepter, et oublier aussitôt, ces prises de risques, et tant d'autres. Si, pour sauver un homme, Dieu donne son fils, nous pouvons sans peine accepter de perdre la face aux yeux de quelques-uns, d'être manipulés ou critiqués, d'être incompris et écarté. Et quand bien même l'amour de l'autre passerait par la blessure de l'amour propre, ce serait un progrès pour notre sanctification !

Ce que ta main trouve à faire

On s'interroge souvent : où et comment s'engager pour répondre à un tel appel ? C'est une mauvaise façon de poser le problème. Lorsque nous voulons le meilleur pour nos enfants et les personnes qui nous sont confiées, nous n'attendons pas, pour agir, de feuilles de route ni de listes de choses à accomplir : nous aimons et nous faisons ce que notre intelligence, notre bon sens, notre conscience, notre analyse nous dictent…

S'engager dans la société, c'est donc avant tout l'aimer et aimer chaque personne qui la compose. Même si peu sont assez aimables pour mériter notre engagement. Si Jésus n'était là que pour les gens aimables (dignes d'être aimés) il ne serait sûrement pas là pour moi !

Nostalgie et leçons de l'histoire

Le protestantisme, et donc une certaine lecture de l'Évangile, a été performant et innovant dans l'histoire lorsqu'il a cherché à vivre l'amour du prochain en portant le geste d'amour (plus que le discours) auprès de tous ceux qui vivaient l'injustice des hommes sous toutes ses formes. Il a perdu de sa pertinence lorsqu'il a pensé que l'État pouvait faire ce que l'Évangile commandait. Il a perdu aussi de son crédit lorsqu'il a pensé que l'engagement politique suffisait pour faire changer la société et la conduire sur un chemin de Justice. Il a enfin perdu de son sens lorsqu'il a substitué Dieu par un parti, Jésus par une idéologie et l'Évangile par un programme. L'équilibre est difficile, mais il n'est pas impossible : Je te montrerai la voie que tu dois suivre !

Point d'ancrage

Pour garder l'équilibre, il faut sans cesse revenir vers celui qui inspire nos gestes et nos propos. Avant tout, pour l'adorer certes, et c'est ici le meilleur moyen de ne pas changer de dieu en cours de route et se fourvoyer avec des idoles séduisantes. Ensuite, pour rechercher la connaissance, pour saisir la sagesse et le discernement ; car c'est ce que Dieu accorde à ceux qui lui sont assez proches pour qu'il leur confie ses desseins. Car l'étonnant de l'aventure, c'est que Dieu souffle ses plans aux oreilles de ses enfants ; il leur donne le sens de l'Histoire et les invite à y participer. Mais il n'entre dans une telle action qu'avec ceux qui veulent être co-ouvriers.

Or, nos Églises sont beaucoup trop préoccupées par elles-mêmes et par leur propre survie pour espérer exister utilement encore longtemps. Si l'Église devient pour le chrétien un refuge au lieu d'être une rampe de lancement, nous ne sommes plus dignes du beau nom que nous portons, et nous sommes coupables de non-assistance à société en danger.

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