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Comprendre les dérèglements nutritionnels
5. Le contexte familial

Auteur :
Type : Dossier
Thème : Santé & Psychologie
Source : Aimer & Servir
Réf./Date source : 107-109  
Publié sur Lueur le
Sommaire du dossier :
  1. Comprendre les dérèglements nutritionnels
  2. L'anorexie : causes et effets
  3. La boulimie : causes et effets
  4. Le contexte familial
  5. Témoignage de Helena WILKINSON
  6. La décision de changer
  7. Le processus de guérison

Les causes des troubles du comportement alimentaire sont multiples. L'une d'entre elles est en relation avec le milieu familial, l'éducation. C'est un sujet à traiter avec précaution. Personnellement, je bannis le terme de "faute". Ce n'est la "faute" de personne.

Lorsque j'étais à l'hôpital, très atteinte par l'anorexie, ma mère me visitait régulièrement. Un jour alors qu'elle me quittait, une voisine s'approcha de sa voiture et lui lança : "J'espère que vous réalisez que c'est toujours la faute de la mère !!". Voilà justement le genre de phrase à ne jamais prononcer, tout simplement parce que c'est faux. Mais pour aider le patient, il sera nécessaire de tenir compte de sa famille.

Je comprends personnellement les troubles du comportement alimentaire comme un dérèglement familial autant que de la personne elle-même. On attend le plus souvent un changement profond de la part du patient, mais si les membres de sa famille sont prêts à voir le problème face et à opérer des changements eux aussi, la guérison du malade en sera facilitée.

Traits marquants chez les parents

Dans leur majorité, les parents sont pleins de sollicitude, et veulent le meilleur pour leurs enfants. Mais ils ont eux mêmes vécu des conflits intérieurs sans les résoudre, ce qui contribue à la survenue de troubles du comportement alimentaire chez leurs enfants.

Ils s'occupent le plus souvent très bien, matériellement parlant, de leur famille, mais l'échec se situe au niveau de l'apprentissage de la gestion des émotions.

Dans ces familles, le poids, la nourriture tiennent un rôle excessif, et l'attention de tous est focalisée sur ces points. Examinons quelques domaines où les parents, tout en ayant de réelles qualités, sont susceptibles de mettre leurs enfants en danger. Ces points ne concernent pas tous les parents, mais j'encourage chacun à considérer honnêtement sa vie personnelle, sa famille, pour trouver les domaines à modifier.

Le père est souvent décrit comme distant, rigide, s'investissant peu dans le domaine affectif vis à vis de ses enfants, ainsi que perfectionniste, ambitieux. Il est mal à l'aise quant à ses problèmes sentimentaux, ainsi qu'à ceux de son entourage.

La mère, elle, est décrite comme angoissée, manipulatrice, négative, très préoccupée par le bien être physique de ses enfants ; mais lorsque des difficultés surviennent, elle a tendance à se mettre en retrait, sous prétexte qu'elle est trop anxieuse pour satisfaire leurs besoins. S'il se peut que ces traits de caractère fassent obstacle au bon développement de l'enfant, il est souhaitable de chercher à les modifier.

Communication

Ce que la famille peut faire de plus important, c'est de communiquer avec ses membres, et c'est justement là que de graves insuffisances apparaissent. Souvent les parents qui ont eux mêmes été blessés dans le domaine affectif, génèrent ces difficultés.

Dans ces familles, il arrive que les enfants soient chargés de responsabilités qui ne leur incombent absolument pas. Nous avons vu plus haut que l'enfant qui devient anorexique est en général celui qui souhaite le plus améliorer la qualité de la vie en famille, qui veut qu'elle reste unie. Il se charge alors d'une responsabilité (ce qu'on ne lui a peut être pas demandé à vrai dire), qui le dépasse sur le plan affectif. Un chercheur du nom de Hildebrooke, qui a étudié l'anorexie en Grande-Bretagne affirme: "Avant de devenir anorexique, l'enfant était perçue par ses parents comme très gentille, aimable, généreuse, posant très peu de problèmes. Mais souvent, déjà à ce stade, cette jeune fille ressentait une angoisse profonde". (Il faut noter également le problème de communication majeur).

Cette enfant se perçoit elle même comme n'étant pas assez bonne, ne répondant pas à l'attente de ses parents, et courant ainsi le risque de perdre leur affection. Mais elle cache ces sentiments, et fait semblant d'être heureuse, alors qu'au fond, elle se trouve indigne, ingrate et sans mérites, trouvant qu'elle a reçu trop de privilèges. Elle ploie alors sous le fardeau des exigences de cette "haute position" imaginaire. L'anorexie affecte les classes sociales élevées, dans des familles qui donnent beaucoup à leurs enfants, tant matériellement qu'en opportunités de toutes sortes. Mais si l'enfant a déjà tendance à se dévaloriser, plus on lui donne, plus ce sentiment d'indignité se renforce. C'est un cercle vicieux : les parents espèrent qu'en donnant davantage, les choses iront mieux, et c'est le contraire qui se produit. Le point fondamental pour cette jeune personne est de changer d'attitude vis-à-vis d'elle même, de manière à recevoir, mais également à donner à d'autres.

De nombreuses recherches ont été faites dans ce domaine de l'anorexie, mais des études semblables ont également montré des relations très médiocres dans la famille de jeunes boulimiques.

Honte et dépréciation de soi

Une affirmation courante consiste à dire que les troubles du comportement alimentaire surviennent dans des familles dysfonctionnelles ; personnellement je trouve ce terme négatif. D'ailleurs, on a pu affirmer que 90 % d'entre nous proviennent de telles familles ; il n'y aurait donc que très peu d'espoir ! Je préfère utiliser le terme de honte.

La culpabilité est le sentiment qui fait dire "J'ai fait quelque chose de mal`; alors que la honte fait dire "Je suis mauvais" ; il y a quelque chose de foncièrement mauvais en moi. Ce dernier sentiment caractérise ces familles, où il devient alors très important de se conduire "correctement"; "bien", ce qui conduit logiquement à cacher les choses.

Apparaissent alors des "règlements tacites", pour éviter des situations qui évoqueraient cette honte ; une façade sera présentée à toute communication venant de l'extérieur.

Une autre attente subtilement exprimée sera : l'enfant doit être précocement adulte ; ceci parce que les parents ne savent pas s'adapter au comportement de l'enfant. Ce dernier en déduit "il faut que je sois adulte"; bien avant d'en être capable ; et lorsqu'il aura grandi, plus tard, il restera affectivement, un enfant. Les troubles du comportement alimentaire peuvent aussi être une façon de compenser l'absence de préparation à l'entrée dans le monde des adultes.

Les limites

Elles sont difficiles à fixer pour ces familles : par exemple la vie privée, l'intimité peuvent être si importantes dans certaines familles que leurs membres éprouvent des difficultés à vivre proches, à partager, à nouer des relations étroites. A l'inverse, plutôt dans les familles où se trouve une anorexique, le besoin d'avoir une vie privée au sein du groupe familial est vécu comme un rejet par les autres membres. On considère que tout doit être partagé, tout doit être connu. Même les sentiments deviennent la propriété de la famille, et il est impossible qu'un membre soit bouleversé sans que cela affecte profondément toute la famille (sans que l'on puisse parler dans ce cas de véritable empathie). Exemple : lorsqu'un enfant vit un événement bouleversant, il a tendance à chercher la consolation auprès de sa mère, il va lui parler de ce qu'il a vécu, et attend d'elle du réconfort, de la sécurité, et qu'elle soit "forte". Mais il se trouve que la mère elle-même est bouleversée, au point où l'enfant réalise qu'il va devoir lui-même la réconforter et la soutenir. C'est un exemple de franchissement de limite.

Implications

Nous avons déjà remarqué que les anorexiques éprouvent des difficultés à émettre une opinion ; cela se manifeste souvent dans la relation mère fille, même s'il est difficile de définir exactement où se situe le problème. La mère parle à la place de sa fille ; c'est peut être parce que cette dernière est timide, donc cela l'aide. Mais, à un moment donné, cette fille voudra prendre la parole ; or sa mère continuera à parler pour elle. Là commence la difficulté ; il n'y a pas de communication entre elles deux ; cela génère de la colère, elle même inexprimée. Ce genre de relation entre une mère et sa fille adulte, ressemble plutôt à celle qui existe entre une mère et son bébé.

Comment tout cela a t il commencé ? C'est peu clair ; peut être la fille se comporte t elle comme un enfant, et la mère la traite alors ainsi ; peut être également que la mère empêche sa fille de grandir.

Mais dans tous ces cas, le problème nécessite une solution ; des recherches sur les familles d'anorexiques ont montré quatre domaines problématiques :

  • l'implication excessive,
  • la surprotection,
  • l'absence de volonté de changement,
  • la tendance à éviter les conflits.

Si le conflit reste inexprimé, l'enfant n'apprend pas la résolution de ce type de difficulté (conflit résolution). Nous avons vu plus haut que l'anorexique craint les conflits ; et lorsqu'elle entre dans le "vaste monde", elle en rencontre inévitablement. Si elle n'a pas appris à les résoudre, elle aura peur du monde, et donc peur de grandir, ne sachant pas "faire face". Or il est vrai que les conflits sont omniprésents ; une dispute, une divergence d'opinion par exemple.

Sentiments

L'enfant apprend, au sein de sa famille, à refouler ses sentiments de manière à être acceptée. D'une façon inconsciente, les parents créent une atmosphère qui ne favorise pas l'expression de ses sentiments. Les désaccords sont évacués. Ces enfants n'apprennent pas à communiquer ouvertement, mais plutôt indirectement. Les troubles du comportement alimentaire sont un de ces moyens de communiquer, par lesquels l'enfant dit quelque chose sur elle même, sur les autres, sur sa famille, sur ce qu'elle ressent dans la vie. Elle n'apprend pas, ainsi, que l'on peut avoir un désaccord avec quelqu'un, tout en continuant à être respectée et acceptée par cette personne. Elle pense qu'en cas de désaccord, elle sera rejetée.

Commentaires (1)

par OhRozyRozy

Au vu de ce que j'ai lu avec justesse ,je pense souffrir effectivement de compulsion alimentaire et me suis reconnue dans ce que vous avez publié .
J'ai fait des séjours en psychiatrie mais le fond du problème n'a jamais vraiment été remué ,j'ai passé par plusieurs barbiturques . Bien que ça soit tout un ensemble de mon comportement qui m'a amené dans ces hôpitaux pas seulement les troubles alimentaires jqui sont même survenus quelques temps après ma première hospitalisation . Aujourd'hui j'ai 27 ans et j'ai parcouru un bout de chemin ,j'ai intégré un centre de réhabiitation pour personnes ayant des troubles psychiques Ma question POURQUOI? m'est plusieurs fois venue : pourquoi suis je tombée dans tous ces comportements auto destructeurs ? Pourquoi me suis je éloignée de toi Jésus ? Aujourd'hui Dieu merci je vais beaucoup mieux . Mais il reste du chemin à faire et bien que ni vous ni moi n'ai tout abordé (même si je me suis reconnue à 80% dans ce que vous avez écrit) j'ai envie de faire ce pas résolu vers une réelle réhabilitation accompagnée par mon Sauveur dont j'ai pris la résolution de le suivre à nouveau. Je désire correspondre avec vous et avec d'autres chrétiens qui vivent/ou ont vécu une expérience similaire puis je vous contacter en privé ?
En Christ ,

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