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Y a-t-il un modèle biblique de la famille ?

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Type : Réflexion
Thème : La famille
Source : Construire Ensemble
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Publié sur Lueur le
La question ainsi posée suggère qu’une réponse positive n’est pas évidente. Nous commencerons notre rapide enquête, limitée à l’Ancien Testament, en prenant d’abord en compte les raisons de douter.

Les récits bibliques nous plongent au cœur de configurations familiales étranges: recours de l’épouse à sa servante pour compenser sa propre stérilité (Sara, Rachel, Léa), mariage avec deux sœurs (Léa et Rachel), conflit entre deux épouses dans un ménage ordinaire (parents de Samuel), complexités et drames de la famille royale (David). Les plus grands personnages de l’Ancien Testament (Abraham, Jacob, Samuel, David, Salomon) se trouvent mêlés à ces troublantes histoires. Moïse lui-même n’est pas indemne, ses relations conjugales semblent receler des zones d’ombre qui ont nourri la rancœur de son frère et de sa sœur (Nb 12.1). Les gens heureux n’ont pas d’histoire, dit-on, les récits se portent naturellement sur les situations douloureuses et embrouillées, mais on sent bien à la lecture de ces récits que la vie familiale ordinaire dans une société où l’esclavage et la polygamie faisaient partie du paysage humain ne peut guère être considérée comme un modèle enviable.

Les dispositions consignées dans les lois du Pentateuque confirment l’impression mitigée. La loi gère une situation marquée par les deux fléaux déjà signalés (polygamie et esclavage). Elle tend à en limiter certains effets les plus pernicieux. Une fille vendue comme esclave et prise par son maître comme épouse de second rang (concubine) ne peut plus être revendue comme esclave (Ex 21.8). Dans une famille polygame, le fils premier-né ne peut être lésé de ses droits au gré des préférences de son père pour l’une de ses épouses (Dt 21.15-17). Autre exemple de gestion d’une situation compromise: l’obligation pour le mari, en cas de répudiation, de donner à son épouse une attestation écrite (Dt 24.1). La loi confirme cependant avec force l’institution familiale: deux des dix commandements fondamentaux lui apportent directement leur soutien, le cinquième (honore ton père et ta mère), le septième (tu ne commettras pas d’adultère). Et le dernier commandement, plus intérieur et de portée plus générale (tu ne convoiteras pas), désigne cependant en premier lieu la femme du prochain. À défaut de modèle, la loi définit un cadre essentiel.

La littérature de sagesse avec le livre des Proverbes présente sur la famille de nombreuses observations et un enseignement qui nous rapprochent davantage du modèle. Le portrait de la femme de valeur qui clôt le livre (Pr 31.10-31) dessine bien un modèle d’épouse et de vie familiale. Il n’est pas surprenant que l’ancrage du modèle dans son milieu naturel, la société antique patriarcale, éveille aujourd’hui quelques doutes sur sa pertinence actuelle. Mais la personne ainsi campée, nette et vigoureuse, se détache assez de son environnement historique et social pour mériter le respect des lecteurs contemporains et exercer sur eux un attrait.

S’il est une déclaration biblique qu’on ne peut assurément pas suspecter de connivence avec le modèle patriarcal, c’est la parole célèbre du début de la Genèse, citée dans toutes les cérémonies religieuses: «L’homme quittera son père et sa mère, s’attachera à sa femme et les deux deviendront une seule chair» (Gn 2.24). Les réalités économiques de la société agraire patriarcale commandaient exactement le contraire: c’est dans sa famille, auprès de ses parents, que l’homme trouvait son moyen de subsistance (la terre). C’est donc la femme qui quittait père et mère pour rejoindre la famille de son mari. Les seules exceptions dans l’Ancien Testament correspondent à des situations de détresse où le nouveau marié, dépourvu de moyens de subsistance, se trouve en position de dépendance humiliante par rapport à son beau-père (Jacob, Moïse, Samson). Ce serait se méprendre sur cette déclaration que d’y voir la trace ou l’amorce d’un anti-modèle, en concurrence avec le modèle patriarcal. Comme parole fondatrice, elle révèle le mariage comme une réalité qui transcende les configurations particulières qu’il peut connaître en fonction des coutumes et des réalités économiques différentes. Jésus y renvoie ses auditeurs à propos d’une question sur la répudiation (Mt 19.3-9 et textes parallèles). Il distingue ainsi les intentions du Créateur des dispositions visant à gérer des situations confuses.

Les prophètes recourent de manière privilégiée à l’image conjugale pour décrire les relations entre Dieu et son peuple. L’image ainsi dégagée est loin d’être idéale, car l’épouse est une infidèle éhontée. Mais l’amour de Dieu pour son peuple offre le modèle bouleversant de la persévérance pour rétablir la relation rompue: «Je t’aime d’un amour éternel, c’est pourquoi je te conserve ma bonté» (Jr 31.3).

Y a-t-il un modèle biblique de la famille? La réponse ressort clairement des intentions du Créateur et de l’enseignement de Jésus et des apôtres: un homme, une femme, unis pour la vie, cadre naturel du développement et de l’éducation des enfants. Les modèles générés par les différentes cultures humaines coïncident plus ou moins avec le modèle biblique. On a repéré les écarts significatifs de certaines configurations familiales antiques. La tendance contemporaine à s’affranchir des modèles ou à promouvoir la diversité jusqu’aux extrêmes s’écarte plus dangereusement encore des voies divines. Le chrétien sait pourtant que, même dans les situations les plus compromises et les plus embrouillées, Dieu se plait encore à agir en vertu de sa grâce. Le croyant s’appliquera, pour sa part, à suivre les instructions divines, confiant dans la sagesse et l’amour de celui qui les a données pour la sauvegarde de l’humanité.

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